Le soulagement des McLean : La fin d'une vieille chanson.
Robert McLean, avril 1970
Bonjour.
Mon grand-père m'a montré ce blogue il y a longtemps. Je n'y ai jamais écrit. Je suis un homme de peu de mots. Mais aujourd'hui, c'est différent. J'ai signé les derniers papiers. La ferme laitière que mon arrière-grand-père Henri-Firmin, a bâtie, est maintenant la propriété d'une grande coopérative. Je vais travailler pour eux, comme gérant. C'est la fin d'une époque.
Mon arrière-grand-père était un optimiste. Il croyait en la loi de 1854. Il a commencé à payer sa rente, certain qu'un jour, il rachèterait le capital. Il n'a jamais pu. Ni mon grand-père. Ni mon père. C'était une petite somme, bien sûr. Dans les années 30, ce n'était que quelques dollars par année. Mais c'était comme une vieille chanson triste qu'on était obligé d'entendre chaque automne.
Je me souviens, j'étais un petit gars dans les années 40 quand le gouvernement de M. Duplessis a aboli les rentes pour de bon. L'État a payé les derniers seigneurs. Mon père est rentré ce soir-là et il a dit à ma mère : "Ça y est. On est enfin propriétaires. Henri-Firmin peut reposer en paix."
On a été propriétaires pendant 30 ans. Mais le monde a changé. Les petites fermes comme la nôtre ne peuvent plus survivre seules. Alors on a vendu. Je ne suis pas triste. Je suis soulagé. La boucle est bouclée. Il aura fallu 100 ans, une révolution tranquille et la création des coopératives pour que la promesse de 1854 devienne enfin une réalité, même si ce n'est pas de la façon dont nos ancêtres l'avaient imaginée. La terre ne nous appartient plus, mais la dette non plus. Et ça, c'est une liberté que je peux comprendre.
Robert McLean, arrière-petit-fils d'Henri-Firmin McLean, agriculteur.