
Mon goût pour des aventures aériennes me vient de très, très jeune. J'ai toujours aimé grimper aux arbres et glisser le long des branches. J'aimais bien aussi plonger du haut d'un surplomb ou d'un rocher dans la rivière. Finalement, c'est une expérience inoubliable avec un parapluie qui m'a donné la piqûre du vol aérien. J'avais environ 10 ou 11 ans au moment où une idée curieuse m'a été suggérée par un incident cocasse.
Il ventait fort ce jour-là. Je jouais sur la place du marché avec mes frères et d'autres compagnons, quand soudain une violente bourrasque à fait gonfler les auvents des étals et des éventaires et en a emporté plusieurs, emportant les plateaux de marchandises et les tréteaux qui y étaient rattachés. Je me suis dit que si j'avais été un tréteau ou un de ces plateaux, j'aurais été emporté moi aussi. J’avais remarqué aussi que plusieurs parapluies avaient été retournés par le vent, et une dame, plus mince que les autres, a presque été emportée. Alors, j'ai eu l’idée de commencer à sauter en bas des murets et des branches en me servant d'un parapluie (que j'avais discrètement emprunté à ma mère) pour amortir ma chute.
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Mais comme je sautais de plus en plus haut, le parapluie s'est brisé et j'en ai été quitte pour une bonne fessée de la part de mon père. Mais cela ne m'a pas découragé. J'ai décidé de construire mon propre parapluie en me servant du parapluie brisé comme modèle. Je l'ai agrandi pour pouvoir sauter encore plus haut. Finalement, dans mon expérience la plus téméraire, j'ai attaché deux parapluies ensemble et je me suis jeté du haut d'un toit, à une vingtaine de pieds du sol, je crois. Plusieurs curieux s'étaient rassemblés pour voir le phénomène. Je me souviens même d'un bonhomme rougeaud, un peu grassouillet qui se moquait de moi : |
— Eille le petit-cul, sur la toiture, tu te prends pour une grosse corneille!
Et il faisait le pitre en imitant le battement d'ailes d'un oiseau maladroit. Finalement, je me suis lancé dans le vide. Mes deux parapluies ont non seulement amorti ma chute, mais ils m'ont fait planer sur plusieurs pieds. Comme par hasard, j'ai atterri sur le gros bonhomme rougeaud qui n'avait pas encore fini de rire. Bannng! Il a été assommé bien net et moi, je m'en suis tiré avec une foulure.
Cet accident a interrompu ma carrière d'«homme-oiseau» pendant un certain temps. Même le maire du village s'en est mêlé. Ils ont fait un règlement pour empêcher le saut en parapluie!!! Mais je me suis repris plus tard, et de belle façon avec plusieurs voyages dans le monde d'Éole (le dieu du vent).